Sony Music France et Warner Music France renforcent leurs activités de partenariats entre les artistes et les marques

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La popularité des artistes de la musique est un atout qui attire les marques souhaitant renforcer et valoriser leur image dans un environnement toujours plus concurrentiel. Avec le retour de la croissance et la constante augmentation de la popularité des artistes, permise par les réseaux sociaux et autres relais d’exposition, les maisons de disques ne vendent désormais plus uniquement la musique de leurs artistes. Il s’agit désormais de capitaliser en plus sur leur image, leur popularité, leur influence. Les artistes français et francophones deviennent eux-mêmes des marques en plus d’être des ambassadeurs. Les partenariats avec les marques sont intégrés à l’exploitation des projets par les maisons de disques et à leur stratégie. Analyse des relations entre les mondes des marques et de la musique.

Les liens entre les marques et la musique ont été noués il y a déjà plus de dix ans dans l’écosystème français. Les activités de diversifications des filiales françaises de Sony Music, Universal Music et Warner Music et des labels indépendants, comme la production de spectacles et les partenariats, ont démarré pendant la crise du marché de la musique enregistrée. Trouver de nouvelles sources de revenus était impératif pour améliorer la rentabilité des projets. Mais au départ, le spectre des partenariats avec les marques n’était pas aussi large. « Entre 2006 et 2012, les maisons de disques vendaient avant tout la musique de leurs artistes aux opérateurs et aux grandes entreprises via des plateformes de téléchargement avec pour objectif principal de fidéliser leur client. Il est devenu de plus en plus difficile pour les marques de valoriser ces offres auprès des consommateurs à cause du piratage puis de la baisse du téléchargement légal. Et surtout, on s’est vite aperçu que les marques avaient en réalité besoin de proposer des expériences et des contenus inédits à leurs clients pour créer de l’engagement » analyse Sébastien Perrier, Directeur de la Communication Corporate et des Partenariats chez Sony Music Entertainment France depuis 2013 après treize ans dans le groupe Havas. La production d’expériences et de contenus inédits avec la participation des artistes exigeait avant tout de pouvoir utiliser leur image. Les contrats dits à 360 ont permis ce type d’exploitation. « On s’est rendu compte que les artistes étaient devenus des marques, notamment parce que pendant des années on avait investi pour les développer. Paradoxalement, on avait laissé d’autres sociétés les exploiter. Les contrats 360 ont permis d’élargir l’acquisition de droits liés à la musique enregistrée à des droits pour l’exploitation de l’image, les représentations privées, le licensing ou le merchandising » observe Romain Tassinari, Directeur de Warner Music 360. Autant de paramètres qui ont permis de décupler les partenariats avec les marques en quelques années, et ce dans beaucoup de secteurs différents tels que la mode, les cosmétiques, l’agroalimentaire, ou la finance.

Réorganisation et spécificités

Les artistes associant leur image à des marques sont toujours plus nombreux. Toute une panoplie de prestations est proposée aux marques et elle se décline sur le placement de produits, le brand-content, l’endorsement, à savoir le fait pour un artiste de devenir ambassadeur d’une marque, ou encore les concerts privés. Et dans l’optique de mieux converger avec les attentes des marques et d’offrir les meilleurs services aux artistes en la matière, les majors ont réorganisées leurs activités sur ce segment. Toutes revendiquent leur singularité. « Warner Music 360 est le fruit des deux départements dédiés aux partenariats au sein d’EMI et de Warner, fusionnés lors du rachat de Parlophone par Warner Music France. Warner Music 360 se démarque en étant complètement intégré à la vie des labels. L’équipe est composée de neuf personnes dont une directrice commerciale, un directeur marketing, deux juristes et trois chefs de projets. Nous sommes à la fois capables de monter des opérations de A à Z en toute autonomie mais nous travaillons en étroite collaboration avec les équipes des labels, les artistes et leurs managers » précise son Directeur. Warner Music France exploite également son expertise sur le digital pour agrémenter son activité dédiée aux partenariats avec les marques. « Nous avons une approche très data lorsque nous répondons aux sollicitations des marques. Chez Warner nous avons une équipe dédiée de trente personnes chargées de l’analyse et la commercialisation de la data. Nous sommes capables de fournir un niveau d’expertise assez unique qui couvre les données relatives à la consommation et la visibilité sur les plateformes de streaming mais aussi les réseaux sociaux. Aujourd’hui les marques sollicitent certes des artistes populaires mais aussi et surtout avec de forts taux d’engagement » confirme Romain Tassinari. Du côté de Sony Music Entertainment France, présidée par Stéphane le Tavernier, l’accent est davantage mis sur l’artistique. « Nous avons décidé de nommer l’entité Sony Music Partnerships pour bien souligner l’idée première de créer un partenariat entre une marque et un artiste. A mon arrivée, j’ai pris le parti de mettre la création au centre de notre entité. Nous sommes aujourd’hui 8 personnes dans l’entité et travaillons aussi bien avec les agences qu’avec les marques directement. Notre métier est d’être l’interprète entre deux univers : le monde très cartésien des marques et le monde très émotionnel de l’artistique. Notre objectif est de créer une histoire commune dans laquelle la marque et l’artiste vont se reconnaitre. Nous pouvons tout à fait aussi partir des envies de l’artiste pour aller voir les marques qui pourraient lui correspondre » résume Sébastien Perrier. La production exécutive d’évènements ou la programmation artistique pour les marques sont aussi très présentes dans l’activité de Sony Music Partnerships. Parmi les opérations les plus importantes récemment, le booking exclusif de Mariah Carey lors de la soirée Chopard au dernier Festival de Cannes, la cérémonie d’ouverture de la Coupe du Monde de football Féminine de la FIFA avec JAIN le 7 juin, la programmation de la terrasse Ibis Music au Jazz Festival de Montreux (Suisse) à venir ou encore la production d’une soirée pour Mastercard afin d’amplifier sur la France sa nouvelle identité sonore. « Les marques nous sont fidèles et nous sollicitent effectivement pour notre expertise. Elles nous confient maintenant la production globale de leurs évènements comme la soirée Mastercard le 6 juin où, à l’occasion du lancement de leur nouvelle identité sonore, les artistes Thibault Cauvin, Les Gordon, et Doppelganger, ont été invités à partager leurs inspirations et réinterpréter en live les six notes de cette nouvelle signature » ajoute Sébastien Perrier.

Les partenariats intégrés à la stratégie d’exploitation des projets

S’ils étaient principalement une source de revenus complémentaire pour pallier la baisse des ventes d’albums il y a quelques années, les partenariats avec les marques sont maintenant un élément important de la stratégie des labels pour exploiter les projets des artistes et promouvoir leurs artistes notamment lors d’évènements très médiatisés. Universal Music France, Présidée par Olivier Nusse, a pour sa part opéré une refonte de ses activités avec une nouvelle agence, A&R Studios. La structure regroupe entre autres les activités de partenariats, auparavant exercées par Universal Music & Brands, et de merchandising avec des synergies mises en place avec les labels. Sony Music Partnerships s’applique de son côté à développer des projets de partenariats en lien avec l’actualité musicale de l’artiste. « Les partenariats permettent aussi de nourrir l’écosystème promotionnel de l’œuvre de l’artiste » commente Sébastien Perrier. Il faut dire que les moyens investis par les marques sur leurs campagnes de promotion et marketing procurent aux artistes une visibilité et des relais d’exposition importants. « On s’assure effectivement à ce qu’il y ait un volet communication dans les campagnes donc oui ça expose les artistes et leur permet de toucher une autre frange du public qui est large » concède Romain Tassinari. Parmi les plus importantes opérations de l’année pour Sony Music Partnerships émerge celle avec la FIFA pour associer Jain à la Coupe du Monde féminine de football avec un spectacle créé sur mesure autour de l’artiste pour la cérémonie d’ouverture. L’artiste reconnaissable à sa combinaison bleue et rouge sera également ambassadrice Adidas autour de l’iconique chaussure Americana jusqu’à la fin de l’année 2019, avec notamment une campagne à la rentrée. Chez Warner, « on fait attention à ne pas aller à contre-courant du travail des labels qui développent l’image des artistes. Quand on signe un artiste, on établit une cartographie de son univers avec les choses qui lui plaisent et ne lui plaisent pas, et on va ensuite démarcher des marques qui lui correspondent » explique Romain Tassinari. Warner s’est d’ailleurs aussi positionné sur la Coupe du monde féminine avec un partenariat initié entre Aya Nakumura et Nike. Autre opération d’envergure pour la major présidée par Thierry Chassagne en matière de partenariats, un deal pour faire d’Aya Nakamura, actuellement en tournée, l’égérie d’une grande marque de cosmétiques à partir de la rentrée. Du côté des artistes hors du giron majors, le partenariat le plus important profite à Maitre Gims signé chez Play Two et TF1 Musique et en distribution avec Sony Music. L’artiste est actuellement ambassadeur de Fanta, alors que vient de sortir la réédition de son album ‘Centure Noire’ (Transcendance) et qu’il se produira au Stade de France en septembre.

Une centaine de projets par an et entre 4 et 5 millions d’euros de revenus pour Sony Music et Warner

Les partenariats entre les marques et les artistes représentent une centaine de projets par an pour Sony Music Partnerships et génèrent un chiffre d’affaires compris entre 4 et 5 millions d’euros. « Sur cette centaine de projets, nous avons 45 opérations live en moyenne et une dizaine d’endorsement et de création de contenus autour d’un artiste pour une marque. Cela concerne une quarantaine d’artistes chaque année, dont Jain, Brigitte, Bagarre, Boulevard des Airs ou encore Vendredi sur mer » détaille Sébastien Perrier, Directeur de Sony Music Partnerships. Pour Warner Music France, c’est également une quarantaine de projets qui est réalisée chaque année autour d’une trentaine d’artistes de l’écurie comme Moha la Squale avec Lacoste l’été dernier et aussi d’une dizaine d’artistes signés ailleurs dont Gaël Faye (AllPoints) et Ibeyi (Beggars) pour le Levi’s Music Project. Les revenus générés par les partenariats signés par Warner Music France avec les marques s’élèvent à environ 4 millions d’euros. Les montants des contrats conclus avec les marques ne sont pas communiqués, mais ils peuvent aller de milliers d’euros à plusieurs centaines de milliers d’euros pour les deals les plus importants. Une activité rentable pour les maisons de disques et qui permet aux marques d’accroître leur notoriété et de cibler des consommateurs faisant partie des fans de musique. Les partenariats avec les marques sont aussi bénéfiques pour les artistes dès lors qu’ils sont cohérents avec leur image, en plus de générer des revenus complémentaires.

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