Les scènes publiques convoitent des moyens équivalents à leurs missions

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Lors de son Assemblée Générale annuelle, le Syndicat National des Scènes Publiques (SNSP) a clarifié sa feuille de route. A l’instar des producteurs, festivals et salles réunis au Prodiss ou encore des entrepreneurs groupés au SNES, c’est en prévision du prochain quinquennat que les scènes conventionnées s’accordent sur les lignes directrices escomptées en matière de politique culturelle. Et leur positionnement vient ajouter du relief aux discordances du secteur.

L’union n’est pas le mot d’ordre dans le spectacle vivant. Les demandes des acteurs du privé (Prodiss ; SNES) et du public (SNSP), présentées et communiquées successivement en l’espace de quelques jours, marquent des fractures incommensurables. Mais elles n’empêchent pas les acteurs du privé et du public d’être unanimes sur l’insuffisance de l’engagement des pouvoirs publics, et il n’est pas juste question de moyens financiers. C’est un constat alarmant qui a été dressé par le Syndicat National des Scènes Publiques pendant son Assemblée Générale annuelle. Les scènes conventionnées appellent à une restructuration des dispositifs de collaboration et d’accompagnement. D’après leur syndicat national, il serait difficile d’avoir une vision d’ensemble des scènes publiques du fait de l’absence de toute étude ou observation de la profession. Le SNSP juge donc cruciale la mise en place d’une observation agrégée conjointement par ses membres et les pouvoirs publics. « Cela pourrait tout à fait se matérialiser par la création de cartes pour constater de l’activité des scènes et de l’offre proposée dans l’ensemble des territoires. Une telle carte permettrait aussi d’identifier les disparités entre les disciplines, entre autres » commente Juliette Prissard, Déléguée Générale du SNEP.

100 000 euros

Au-delà de la simple offre de spectacles, ce sont de multiples iniquités que le SNSP espère voir être enrayées par une politique culturelle adéquate aux nécessités de ses 200 membres entre autres. Dans l’optique de rééquilibrer le secteur, le Syndicat National des Scènes Publiques souhaite la généralisation de plusieurs dispositifs bénéficiant pour l’heure à un nombre limité de régions ou de salles. Notamment, que les collaborations entre les collectivités locales, l’Etat et les scènes conventionnées soit clairement « formalisées », à l’image des corrélations en place dans le Centre ou la Bretagne. En parallèle des demandes dans la forme, les scènes publiques chiffrent l’engagement qui doit être celui des pouvoirs publics. Lors de leur Assemblée Générale, les membres du SNSP se sont prononcés pour un financement qui devrait être considérablement élevé pour leur permettre « d’accomplir leurs missions spécifiques ». Il est question d’un plancher à 100 000 euros. Une exigence non des moindres, d’autant que le SNSP ne disposerait pas de toutes les données afférentes au financement par l’Etat des salles publiques sur tous les territoires. Selon sa Déléguée Générale, « les montants alloués sont disparates et il est compliqué d’établir le plancher moyen. Certaines scènes bénéficient de 100 000 euros mais il y en a un certain nombre qui ne disposent que de 10 000 euros. Ce qui est sûr c’est que le minimum de 50 000 n’est pas effectif dans la pratique. A vrai dire, tout le monde est calé sur une circulaire de 1999 qui fixait un montant de 35 000 euros… ».

Effets redoutés de la concentration

La quête de consolidation des scènes publiques s’opère en réaction des divers positionnements des acteurs de la filière. La volonté des entrepreneurs du spectacle quant à une complémentarité entre public et privé n’est pas très bien accueillie au point d’être considérée comme une stratégie de faire fusionner les deux écosystèmes. Les scènes publiques veulent préserver leur statut conféré par leurs missions de service public. Elles ne seraient toutefois pas opposées à s’ouvrir à des spectacles privés. A la condition que leur liberté de programmation, principe renforcé par la réaffirmation des droits culturels dans la loi NOTRe ainsi que la loi LCAP, ne soit pas remise en cause. L’autre mutation redoutée par les scènes est on ne peut plus concrète. Il s’agit de la concentration du marché impulsée par des acteurs devenus leaders en quelques années, notamment Fimalac et Live Nation France. Les rachats en séries de salles de spectacle sont en pole position des inquiétudes des scènes publiques. Elles redoutent un affaiblissement de leurs missions que pourrait provoquer une délégation de service public, qui serait convoitée par certains poids lourds du marché. « Dans une telle configuration, la dimension de l’action culturelle sera menacée de disparition et cela marquerait l’échec de la démocratisation culturelle » prévient Juliette Prissard. Le SNSP n’a cependant pas formulé de propositions ou de demandes pour contrer la concentration du secteur, si n’est par une « réaffirmation d’une véritable ambition artistique et culturelle ». Et c’est précisément ce dont semblent manquer les politiques et en premier plan les candidats à la présidentielle. En tout état de cause, il n’est en revanche pas démontré que la concentration du secteur autour de quelques acteurs nuirait sérieusement à la pérennité de la diversité artistique et culturelle. Live Nation France s’attèle à favoriser le renouvellement et l’émergence de nouveaux talents notamment avec la programmation éclectique et diversifiée de la salle ‘Les étoiles’, tandis que son ‘Download festival’ accueillera cet été entre autres artistes émergents le groupe Far From Alaska, lauréat du Midem Artist Accelerator.

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