Crise : 18 milliards d’euros de pertes pour le secteur de la musique en Europe

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 La 2ème édition du panorama des industries culturelles, réalisé par EY pour le Groupement européen des sociétés d’auteurs et compositeurs (GESAC) présente un double intérêt. Elle met à la fois en valeur le poids économique la Culture au niveau européen, et dresse un bilan de l’impact de la crise. De quoi rendre indispensable le renforcement de la place de la Culture dans la politique de soutien déployée au niveau européen comme dans les pays membres. La musique est évidemment un des secteurs culturels les plus impactés avec pas moins de 18 milliards d’euros de pertes de revenus.  

31 milliards d’euros. C’est le total des revenus du seul secteur de la musique en 2019 en Europe (Royaume-Uni inclus). Le chiffre d’affaires du secteur a réalisé une croissance de 4% par an 2013 et 2019, notamment impulsée par celle de la musique live (+4,4% par an), pour une progression globale de 7 milliards d’euros en six ans. L’étude confirme le statut des industries culturelles en tant que « poids lourd » de l’économie européenne. Leur chiffre d’affaires a atteint 643 milliards d’euros en 2019, avec en hausse de 93 milliards d’euros (+17%) en six ans. 7,6 millions de personnes sont employées dans ces secteurs. La musique, qui n’est pas parmi les secteurs culturels les plus importants en termes de revenus au niveau européen est cependant le 2ème employeur après les arts visuels, avec 1,19 millions d’emplois. Évidemment, la croissance de l’économie de la musique a été nettement freinée par la crise. Les pertes de chiffre d’affaires pour le secteur de la musique dans les pays européens s’élèvent à 18 milliards d’euros entre 2019 et 2020 selon l’étude d’EY s’appuyant entre autres sur les données d’Oxford Economics, qui a récemment réalisé une étude pour IFPI, représentant les intérêts de l’industrie musicale au niveau mondial. La baisse des revenus la musique pourrait atteindre 76%. Ce qui ferait de la musique le secteur connaissant la plus forte chute de recettes après le spectacle vivant (-90%), alors que les autres secteurs connaitraient une diminution comprise entre 20 et 38% (exception faite du jeu-vidéo à +9%). « L’impact sur les revenus du secteur se fera sur plusieurs années suite à l’arrêt brutal de l’activité de la musique live dès les prémices de la crise, tandis que la musique enregistrée a été confrontée à une baisse des revenus sur le segment physique et sur d’autres sources » commente Francesca Trainini, Présidente de l’organisation IMPALA fédérant les labels indépendants. Le détail des pertes de revenus sur les différents segments de l’économie de la musique (musique enregistrée, musique live, droits d’auteurs, droits voisins…) n’est pas précisé dans l’étude. De toute évidence, les baisses des revenus seront considérables sur les segments de la musique live, des droits d’auteurs et des droits voisins en raison de l’annulation des concerts et festivals, la fermeture des commerces diffusant de la musique, des clubs et la baisse des recettes publicitaires des diffuseurs (radios, TV). Avec sans doute des disparités entre les différents pays en Europe. Pour les principaux marchés de la musique enregistrée en Europe (Royaume-Uni, Allemagne, France), la croissance du streaming devrait mécaniquement modérer les pertes engendrées par la fermeture des enseignes spécialisées et l’impact du contexte sanitaire et économique sur la consommation de la musique.

SOUTIEN FINANCIER ET TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE DROIT D’AUTEUR

La perte de chiffre d’affaires pour les secteurs de la Culture atteindrait les 200 milliards d’euros entre 2019 et 2020 (-31%). L’industrie culturelle française, qui fait partie des cinq principales en Europe avec le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, fait cependant partie des plus impactées du fait d’une baisse comprise entre 30 et 35%, avec la Belgique, les Pays-Bas ou encore le Portugal. Les conséquences de la crise ont lourdement fragilisé les finances des entreprises, les emplois, et ont amputé les revenus des artistes et créateurs. Avec en parallèle des impacts dans les territoires étant donné la contribution des secteurs culturels à l’économie du tourisme et à divers secteurs connexes dont dépendent de nombreuses TPE et PME. Les acteurs des secteurs culturels s’accordent sur l’urgence de soutenir l’économie de la Culture avant que le contexte sanitaire et économique ne soit favorable à la relance. L’étude menée par EY avec l’appui de plusieurs organisations professionnelles (GESAC, IMPALA, AEPO-ARTIST) doit permettre de peser dans les prises de décision à Bruxelles. Plusieurs priorités sont présentées en conclusion de l’étude, axées notamment autour du soutien financier et du renforcement du cadre réglementaire, au niveau européen comme dans les pays membres. L’étude suggère notamment de consacrer 2% de l’instrument « the Recovery and resilient facility » (672 milliards d’euros) composant le plan de relance de l’Union Européenne « NextGenerationEU », qui sera décliné sous forme de prêts et de subventions. En matière de cadre réglementaire, il est suggéré de rendre effective dans les meilleurs délais la transposition de la directive droit d’auteur dans les pays membres afin d’améliorer la juste rémunération des créateurs et ayants droit pour l’exploitation de leurs œuvres sur les plateformes.

 

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