La stratégie de la filière musicale pour exister dans la présidentielle

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La filière de la musique a présenté ses propositions à l’attention des candidats à l’élection présidentielle et de leurs équipes. Les grandes lignes ne convergent pas tout à fait avec les priorités sur lesquelles s’accordent les professionnels du secteur. Et pour cause, la musique voit plus grand.

Que le prochain quinquennat soit l’occasion de la mise en œuvre d’une politique culturelle proportionnelle à l’envergure de la musique. C’est l’objectif primordial que s’est fixée la filière musicale. Lors des présidentielles de 2012, les propositions avaient surtout été orientées vers l’économie avec le commerce, le partage de la valeur ou l’offre légale. Cinq ans plus tard, les avancées et résultats manquent à l’appel du fait de l’absence de mesures politiques. Le projet du Centre National de la Musique a été abandonné, la diffusion de la musique dans les médias n’a pas été optimisée, et les créateurs s’insurgent toujours plus contre le transfert de valeur. Pour 2017, la filière musicale adopte une stratégie nouvelle tout en renouvelant ses vœux précédents. Alors que les candidats à l’élection présidentielle s’appliquent à séduire différents secteurs, les organismes réunis au sein de Tous Pour La Musique veulent également susciter l’intérêt. Ce devrait permettre à la musique entre autres industries de la Culture d’émerger et de se maintenir dans les programmes.

Education

La filière musicale veut convaincre les politiques de la portée du secteur auprès des français. Le programme plébiscité, composé de treize propositions, met donc l’accent sur une thématique qui occupe une part traditionnellement importante dans les programmes et dans l’actualité politique: l’éducation. Trois propositions sont consacrées à l’enseignement de la musique. Outre la formation d’orchestres dans chaque établissement – souhaitée d’ici cinq ans – la Musique demande une augmentation des crédits alloués aux acteurs de premier plan dans la transmission de la musique. TPLM appuie d’ailleurs ses propositions d’un sondage venant retranscrire les attentes des français en la matière. Trois français sur quatre souhaiteraient la formation d’un orchestre ou d’une chorale dans tous les établissements, tandis que 62% des 1 000 personnes interrogées jugent insuffisants les moyens dédiés pour l’enseignement de la musique.

Offre en régions

En démontrant – si cela était encore nécessaire – que les français s’intéressent à l’offre musicale mise en place en région, la filière veut la faire exister à tous les niveaux de la politique. La musique est l’activité culturelle principale des français si l’on exclut le sport. L’offre de musique et de spectacles sur l’ensemble des territoires reste cependant à améliorer. Si la majorité des grandes villes sont très actives, certaines régions accueillent trop peu d’évènements culturels. Ou alors les spectacles et festivals qui rythment l’activité en région ne rencontrent pas le succès escomptés. D’autant que la majorité de la valeur créée en régions est captée par les leaders du marché. Les entrepreneurs du spectacle sont en quête de pérennité. L’offre de musiques et de spectacles en dépend. La filière voudrait la voir être consolidée par la création d’ « instances de concertation » qui viendraient renforcer la cohésion des acteurs en régions. D’après le sondage réalisé par Ifop fin janvier, plus de 3 français sur 10 estiment que l’offre de spectacles en régions est insuffisante.

Sécurité des spectacles

Le public est particulièrement attentif à la sécurité des spectacles d’après un sondage récent de Harris Interactive commandé par le Prodiss. Une évidence dans le contexte actuel. Les producteurs et organisateurs en ont fait une priorité. Si les dépenses afférentes à la sécurité ont augmenté de 40% entre 2008 et 2014, elles devraient battre des records sur les années 2015, 2016 et 2017. Des investissements qui portent leurs résultats puisque globalement les spectateurs se sentiraient plus en sécurité dans les salles que dans la vie de tous les jours. Mais les dépenses restent lourdes et prennent une part toujours plus importante dans les budgets des spectacles. Pour y pallier, les organisateurs et producteurs demandent à bénéficier du fonds interministériel de prévention pour les équipements sécuritaires.

Bataille de la valeur en ligne

L’offre de musique et de spectacles en régions et auprès des jeunes publics devra être mieux financée pour être entretenue. Et les créateurs mieux rémunérés. La Musique appelle de ses vœux, une fois encore, la rémunération équitable pour les contenus consommés sur les plateformes. L’évolution du statut d’hébergeur des plateformes sera essentielle. La proposition est quelque peu imprécise, TPLM se limitant au souhait que « la France contribue à corriger le transfert de valeur ». Il faut dire que la bataille de la valeur en ligne se jouera à l’échelle européenne. La filière aura besoin que la France et ses représentants s’expriment d’une seule voix. Or les positions divergent entre plusieurs acteurs. Certains, certes minoritaires en nombre mais importants sur le marché, jugent « dangereuse » la remise en cause du statut d’hébergeur et considèrent que les maisons de disques n’ont pas fait les investissements nécessaires pour aborder la musique en ligne dans les meilleures conditions. En parallèle, à propos de la réforme du droit d’auteur, certains acteurs de la Culture qualifient d’ores-et-déjà de désastreux le rapport du député européen Marc Joulaud à destination de la Commission Culture et Education du Parlement Européen. Et ce à l’heure où la Commission Européenne s’impatiente que des accords sur la modernisation du droit d’auteur soient trouvés avec les représentants des pays et le Parlement Européen. En tout état de cause, la filière musicale ne pourra que mieux défendre ses intérêts économiques auprès des politiques et des autres acteurs si elle renforce sa valeur dans le patrimoine culturel et sa place au sein des préoccupations des français. C’est le but.

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