Le Spectacle se positionne à l’avant-garde du secteur de la musique

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La saison des festivals de musiques actuelles est traditionnellement introduite par le Printemps de Bourges. Et c’est à l’aube du premier tour de l’élection présidentielle que se déroulent les rencontres professionnelles en marge du festival. Le dernier évènement de la filière musicale avant l’entame du prochain quinquennat. Un timing on ne peut plus opportun, qui préfigure la stratégie du secteur du spectacle pour faire valoir ses intérêts auprès des prochains Gouvernement et Parlement.

Les producteurs, diffuseurs, festivals et salles, réunis sous l’égide du Prodiss, se préparent à demander des engagements et des initiatives adéquats au poids économique du spectacle et de la musique. Après la communication des priorités et propositions du Prodiss intervenue un mois avant l’élection, une piqûre de rappel a été faite à l’attention des acteurs ciblés et concernés il y a quelques jours. Les positions du syndicat sont principalement axées sur l’économie. Une différence avec celles de ‘Tous Pour La Musique’ – trait d’union entre les acteurs de la filière – qui a préféré démontrer l’envergure de la musique en tant que pratique culturelle, en vue de convaincre de la nécessité de mesures sur l’enseignement, l’offre en régions, le financement de la création. Le Prodiss s’engouffre dans la brèche en faisant siennes certaines propositions. Et ce tout en restant cohérent avec l’intérêt majoritaire de la filière musicale. Il appelle de ses vœux la création d’un Centre National de la Musique. « Nous souhaitons porter un établissement unique qui soit fédérateur des acteurs de la musique et du spectacle » a souligné Malika Séguineau, Déléguée Générale du Prodiss, qualifiant cette proposition d’ « invitation à réunir les acteurs du secteur pour réfléchir à comment construire cet établissement qui doit être doté de moyens nouveaux ». Le chemin de fer de l’ensemble des mesures politiques plébiscitées par le secteur du spectacle.

Industrie du spectacle

La contribution du spectacle dans l’économie assure de sa légitimité à être un chef d’orchestre de la musique. Le secteur a enregistré un chiffre d’affaires d’1,5 milliard d’euros en 2015, dont 900 millions d’euros générés par la billetterie des spectacles produits et 600 millions d’euros rapportés par les contrats de cession. Mais d’après le Prodiss, il reste largement sous-estimé. Luc Gaurichon, son Président, souhaiterait que sa considération soit réaffirmée notamment par une réorganisation sur le plan politique : « Nous sommes à la DGCA mais en réalité nous pourrions légitimement être rattachés à la DGMIC. Nous nous considérons comme une industrie culturelle et créative. Dans le concept, nous nous y retrouverons, qu’il s’agisse des PME ou des groupes, mais nous ne sommes pas reconnus comme tels. A la DGCA, nous n’avons pas vraiment une administration à l’écoute des problématiques qui nous concernent sur le plan économique ». D’autant que les producteurs de spectacle s’accordent sur le fait qu’ils ont clairement pris le relais des labels et maisons de disques, en termes d’investissements, en matière de développement d’artistes. Et il n’est pas certain, toujours en ce qui concerne le développement, que l’inversement de la courbe du marché de la musique enregistrée soit dans l’immédiat synonyme d’un retour des investissements des maisons de disques et des labels.

Développement

La croissance enregistrée par le spectacle ces dernières années est nuancée par sa concentration. Les récentes études du CNV ont cartographié un paysage très concentré au sein duquel les retombées financières, certes conséquentes, profitent néanmoins aux leaders. D’après Luc Gaurichon, « La vingtaine d’artistes qui réalisent les principales tournées tout au long de l’année génère plus de la moitié des revenus de la billetterie ». Et la loi du marché ne devrait pas reculer de sitôt au vu des rachats en séries des salles de spectacle par Vega (Fimalac) ou encore Live Nation. Certains acteurs du spectacle vivant subventionné redoutent d’ailleurs que de telles opérations ne s’accentuent au cours de l’année. Quoi qu’il en soit, la diversité, la création, l’emploi et la compétitivité sont revendiquées au sein du  Prodiss comme étant des valeurs communes à tout le spectacle. « Nous avons un mot d’ordre : développement. Le développement de nos entreprises et le développement de nos artistes » assume sa Déléguée Générale Malika Séguineau. Le syndicat national du spectacle musical et variété établit à ce titre trois axes, qui se déclinent en le soutien à l’emploi, le renforcement conséquent de l’export et l’impulsion de l’innovation numérique. Parmi les mesures principales plébiscitées émerge la revalorisation du crédit d’impôt dont bénéficient les entrepreneurs du spectacle depuis 2016. Notamment, il s’agirait de rehausser le plafond de 12 000 entrées sur les trois dernières années considéré comme trop faible, de sorte à ce que certains projets jugés méritants par la profession puissent y avoir droit.

Timing opportun

L’export est l’autre priorité mise en exergue par le Prodiss dans le cadre de la politique de développement plébiscitée pour le secteur musical. Une note commune avec ‘Tous Pour La Musique’, bien que quelque peu reléguée au second plan des propositions de la filière. Que l’export tienne une place aussi importante au sein de la stratégie du Prodiss confirme le rôle que tient le syndicat pour impulser l’union dans la filière musicale. Les multiples dissonances de ces deux dernières années (quotas radios, rémunération des artistes-interprètes) n’ont pas enrayé la dynamique du Prodiss à créer des rendez-vous rassembleurs lors des évènements ponctuant la période intense de l’année. A ce propos, le déjeuner annuel de la filière à son initiative qui a habituellement lieu au Midem se tiendra cette année à Paris le 21 juin, en présence de la prochaine ou du prochain Ministre de la Culture. Outre la concordance avec la fête de la musique, l’évènement entamera véritablement le quinquennat pour la filière, trois jours après le second tour des législatives. Un timing qui de toute évidence sera aussi le début du retour à l’offensive de l’ensemble des acteurs de la filière musicale. Mais le spectacle est définitivement décidé à être à l’avant-garde, et ce dans le paysage musical comme sur la scène politique, sans pour autant être en opposition avec les autres. Le premier évènement d’envergure de l’industrie du spectacle, ‘L’année du live’, à l’initiative du Prodiss avec Live Nation est annoncé au 22 janvier 2018 à l’AccorHotels Arena et en prime-time (en direct) sur W9. Le ton est donné.

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