International : le streaming rééquilibre le marché pour les labels indépendants

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WIN (Worldwide Independent Network) rassemble de nombreux labels indépendants du monde entier. L’organisation internationale a étayé dans son rapport « Worldwide independent market » les contributions sur les plans culturel et économique des labels indépendants au sein du marché international de la musique. Une étude inédite, passionnante et très sérieuse qui préfigure que le numérique redistribue les cartes de la musique enregistrée entre majors et indépendants.

Résumer le paysage musical aux répertoires des maisons de disques est une équation inexacte. Le raccourci est coutumier dans la mesure où les majors produisent, distribuent et éditent bel et bien la majorité du catalogue de la musique enregistrée. Mais en réalité ces dernières ne représentent et ne détiennent pas la quasi-totalité de la musique. Dans son rapport, WIN s’est appliqué à répartir les parts de marché entre majors et indépendants sur la base des ayants-droit et non des distributeurs. L’organisation présidée par Alison Wenham – qui a passé 17 ans à la tête de l’Association of Independent Music – opte ainsi pour un angle de vue plus représentatif du marché. La britannique précise d’ailleurs dans son introduction que se prévaloir de parts de marchés conséquentes permettra de meilleures négociations avec les multinationales.

38% de parts de marché

A l’échelle internationale, les labels indépendants ont généré 5,6 milliards de dollars en 2014. C’est 38% de parts de marché et 62% pour les majors. Sur dix-sept marchés mondiaux de la musique enregistrée, seuls six – dont le Royaume-Uni (1,35 Md$) et le Canada (336 m$) – font état de parts de marchés inférieures à 25% pour les indépendants. En Europe, sur les marchés français (809 m$) et allemand (1,3 Md$), 30% de la valeur est créée par les labels indépendants, soit respectivement 252 et 414 millions de dollars. Et la prédominance des maisons de disques sur les continents américain et européen est quant à elle inversée en Asie. Les indépendants détiennent 64% de parts de marché au Japon – qui pèse 1,2 milliard $ – et pas moins de 88% en Corée du Sud. Le rapport de WIN ne retrace pas les évolutions par rapport aux années précédentes, mais il trace une ligne de convergence entre l’avènement du digital et les parts de marché des indés.

2,6 milliards de dollars générés en digital

« Les plateformes de streaming et les réseaux sociaux ont débloqué des audiences d’envergure mondiales pour les artistes du monde entier, et ce n’est donc pas surprenant que 37% des revenus soient réalisés par les indépendants » peut-on lire dans le rapport WIN. En 2014, 2,6 milliards de dollars soit la moitié des revenus des labels indés provenaient du digital avec un ratio de 50/50 (1,1 Md$) entre téléchargement et streaming. Outre le caractère direct et instantané de la consommation de la musique, l’ouverture du marché international via le digital a été une opportunité pour les labels et répertoires indépendants. Et pour cause, la vente sur un marché intérieur et à l’international nécessite une distribution d’envergure. De fait, les labels indépendants dépendent en réalité largement des leaders du marché, au point que les distributeurs internationaux ont assuré 72% de leur distribution et que les structurent appartenant ou liées aux majors en aient assuré 52% en 2014.

Le streaming dépasse le physique en parts de marché

C’est dans ce contexte que les indépendants auraient misé sur le relais de croissance du digital avant même les majors, toujours selon l’organisation dont l’UPFI (Union des Producteurs Français Indépendants) et l’American Association of Independent Music sont membres. Le rapport revendique que les labels indépendants auraient réalisé, en 2014, 59% de revenus sur le digital soit un part de marché supérieure que chez les majors (49%). Toutefois la nette croissance du streaming en 2015 et 2016 devrait avoir équilibré ces chiffres. L’IFPI a annoncé cette année que les revenus du digital avaient progressé de 10% en 2015. Malgré tout le streaming reste un véritable marché qui crée de la valeur pour les labels indépendants. WIN estime que l’augmentation des nouveaux abonnés payants, passionnés de musique, mais aussi le développement des outils de recommandation et de découverte profitent également aux catalogues indépendants. Les parts de marché de l’écoute en ligne au sein des revenus des indépendants dépasseraient celles du physique partout dans le monde, y compris en France, sauf en Allemagne et au Royaume-Uni. On le constate d’ailleurs actuellement en France avec des artistes indépendants tels que Jul (Musicast) et PNL (Believe) entre autres qui survolent le classement du streaming. Preuve en est que le streaming redéfinit les règles et amenuisent la sur-domination des maisons de disques sur le marché. Bien que là-encore, les majors en détiennent les clés.

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