Les auteurs appellent de leurs vœux un droit à rémunération proportionnelle en Europe

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L’export de l’audiovisuel et du cinéma français se porte bien. Les ventes à l’étranger de programmes audiovisuels ont été historiques en 2016 avec 189,1 millions d’euros d’après les chiffres de TV France Intl. Celles des films français sont reparties à la hausse en 2017, au vu de la fréquentation en salles des huit premiers mois supérieure au total de l’année 2016 avec 40 millions d’entrées. En revanche, il n’est pas certain que les exportations des films français et de l’animation, des fictions et des documentaires profitent à tous les maillons de la chaine. Les auteurs veulent s’en assurer avec l’instauration d’un droit à rémunération proportionnelle à l’exploitation des œuvres dans les pays européens.

Acter un juste partage de la valeur en faveur des auteurs. Les discussions vont s’intensifier dans les prochaines semaines au Parlement Européen et au Conseil Européen sur le projet de directive sur le droit d’auteur entre autres. La Commission des affaires juridiques du Parlement Européen a annoncé cette semaine que le vote du texte aurait lieu en novembre. Priorités absolues des auteurs, que les projets de directives et projets de règlements concernant l’audiovisuel et le cinéma aient pour finalité d’améliorer l’exploitation suivie des œuvres, l’exposition des œuvres européennes ou encore le partage de la valeur. La Society of Audiovisual Authors (SAA) et la SACD mènent l’offensive au niveau européen. Mais outre les sociétés qui les représentent, les auteurs sont également en première ligne. Un collectif d’auteurs, dont Audiard, Costa-Gavras, Tavernier, Klapisch, Jaoui, Bonnaire etc., a interpellé la Ministre de la Culture la semaine dernière au travers d’un courrier. Les auteurs reviennent à la charge pour un droit à rémunération proportionnelle à l’exploitation des œuvres. La volonté d’une réponse européenne pour garantir la juste rémunération des auteurs avait déjà été affirmée en mars dernier par Pascal Rogard, le Directeur Général de la SACD, aux Rencontres Européennes des Artistes de l’Adami. Il faut rappeler que cette demande des auteurs est équivalente à celle des artistes-interprétés représentés à Bruxelles par AEPO-Artis. Les auteurs veulent avoir une capacité de percevoir une rémunération sur l’exploitation de leurs œuvres dans l’ensemble des pays européens. L’absence d’harmonisation à l’échelle européenne en matière de droit d’auteur est une entrave à cette rémunération des auteurs qui devrait, de leur point de vue, être proportionnelle à l’exploitation de leurs œuvres sur l’ensemble des marchés. « Ce droit à rémunération au bénéfice des auteurs, c’est ce qui nous permettrait de signer des accords avec les plateformes pour aller collecter des droits. Mais il n’existe pas dans certains pays. Un auteur qui perçoit pour l’exploitation d’une œuvre en France ne percevrait rien en Hongrie par exemple » souligne Guillaume Prieur, Directeur des affaires institutionnelles de la SACD.

Engagement(s)

Le courrier signé par une cinquantaine d’auteurs a été adressé à un moment opportun à Françoise Nyssen. Les termes du courrier appellent clairement la Ministre à ses responsabilités pour peser dans les discussions sur le projet de directive du droit d’auteur. La mission confiée à la Ministre consiste à convaincre le Conseil de l’Union Européenne « de l’urgence d’instaurer un droit à rémunération proportionnelle, incessible et inaliénable, pour les auteurs du cinéma et de l’audiovisuel quand leurs œuvres sont diffusées sur des plateformes en ligne ». Les auteurs estiment qu’ils ne bénéficient pas à juste titre de l’exploitation de leurs œuvres à l’étranger, notamment sur les plateformes de vidéos à la demande. En d’autres termes, qu’ils ne perçoivent pas de rémunération équivalente aux succès de l’animation, des fictions et des documentaires et des films français à l’étranger. La SACD a d’ailleurs rappelé le manque d’encadrement des relations entre auteurs et producteurs la semaine dernière, bien que la signature d’accords de transparence en juillet dernier entre auteurs, producteurs de cinéma et producteurs de l’audiovisuel soit intervenue pour contrebalancer cette opacité. Les discussions entre les protagonistes reprendront d’ailleurs dans une dizaine de jours, avec toujours comme objectif selon la SACD de cimenter une relation équilibrée entre les auteurs et les producteurs. En tout état de cause, l’instauration au niveau européen de ce droit à rémunération proportionnelle à l’exploitation des œuvres permettrait de rendre effectif le partage de la valeur en faveur des auteurs. Elle n’est cependant pas encore acquise malgré le vote en commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie du Parlement Européen en juillet dernier. C’est pour peser en ce sens qu’une prise de position en faveur de la rémunération proportionnelle de la part de la Ministre de la Culture est plébiscitée par les auteurs, la SACD et la SAA. Un engagement qui enverrait un signal fort aux instances de Bruxelles. Bien que certainement en opposition directe avec les positions des lobbyistes des plateformes.

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