Afrique : les sociétés d’auteurs s’associent pour optimiser les perceptions de droits

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Le continent africain est à l’aube d’une évolution en matière de droit d’auteur et de droits voisins. Lors du Forum des Créateurs Africains à Alger, à l’initiative de l’Office National des Droits d’Auteur et des droits voisins d’Algérie (ONDA) et sous l’égide de la CISAC, les représentants de 22 pays dont les Directeurs Généraux de neuf sociétés d’auteurs africaines ont clarifié leurs priorités. Le piratage et l’exploitation illicite des œuvres sont en tête de liste. Les sociétés d’auteurs entament le début d’une contre-offensive.

Le principal challenge pour l’Afrique consiste à contrebalancer le caractère informel de l’économie de la création. En 2016, les sociétés d’auteurs africaines ont perçu un total de 67 millions d’euros soit moins d’1% des perceptions mondiales. Les sociétés d’auteurs africaines ont identifié les principales entraves au développement de leurs perceptions de droits. C’est dans l’optique d’y remédier que dès à présent, avec le soutien de la Confédération Internationale des Sociétés d’Auteurs et de Compositeurs (CISAC), les membres du Comité Africain s’appliquent à mettre en place des synergies. La feuille de route des sociétés d’auteurs africaines se précise avec la signature de deux accords. Le premier, signé en février dernier, consiste en une coopération avec l’African Regional Intellectual Property Organization (ARIPO). ARIPO est un organisme situé au Zimbabwe chargé de la défense, de la coordination et de l’harmonisation des cadres légaux régissant la propriété intellectuelle dans 17 pays anglophones.

Harmonisation des pratiques

L’accord signé avec ARIPO marque le point départ de multiples collaborations pour la formation des personnels des organismes de gestion collective, la mutualisation des bonnes pratiques, ou encore la sensibilisation des politiques. « ARIPO s’est engagé à accompagner les sociétés d’auteurs notamment anglophones dans certaines actions comme le partage de connaissances mais aussi les discussions avec les institutions et les gouvernements » précise Irène Vieira, Présidente de Comité Africain de la CISAC. Cet accord signé pour la partie anglophone de l’Afrique est maintenant agrémenté d’autre accord, été signé avec l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI) le 15 septembre dernier en clôture du Forum des Créateurs Africains à Alger. Un partenariat qui devrait marquer un tournant dans l’activité des 17 sociétés d’auteurs assimilées comme francophones. « La priorité est mise sur la formation pratique des personnels des organismes de gestion collective. La maîtrise des formalités et des pratiques dans la gestion des droits des œuvres musicales et audiovisuelles, mais aussi graphiques et plastiques, c’est le commencement de l’efficacité. L’OAPI est doté d’une Académie et c’est en son sein que ces formations vont se réaliser. Il faut former les personnels pour généraliser les bonnes conduites et pratiques. Cette Académie pourrait permettre des formations d’experts » se réjouit Irène Vieira, qui est aussi Directrice du Bureau ivoirien du droit d’auteur (BURIDA). Une étape cruciale pour optimiser les perceptions de droits en Afrique, qui s’avère être la première étape de la stratégie des sociétés d’auteurs.

Evolution du cadre juridique

C’est un plan étalé sur plusieurs années qui est actuellement mis sur pied en Afrique. Les sociétés d’auteurs membres du Comité Africain de la CISAC se sont accordées sur les grandes lignes à Kigali (Rwanda) en juillet dernier. L’évolution du cadre juridique afférant à la propriété intellectuelle et en particulier au droit d’auteur est un enjeu commun pour les pays du continent africain. Une ambition qui nécessite un travail de fond et des échanges avec les gouvernements. D’autant que les synergies entre ces dernières devront prendre en compte les spécificités juridiques et politiques de chaque pays. Mais les organismes de gestion collective se disent prêts à donner le coup d’envoi une telle évolution qu’ils savent indispensable à la mise en place d’une économie de la culture. « Nous avons aussi décidé d’accélérer en matière de lobbying auprès des gouvernants, mais également dans les discussions visant à sensibiliser les organisations régionales comme l’Union Africaine, la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ou encore l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Nous avons décidé, chaque fois qu’il y a des réunions interministérielles, de constituer un comité qui part à leur rencontre pour défendre les intérêts des auteurs et des créateurs » assure Irène Vieira, Présidente du Comité Africain de la CISAC. Une dynamique qui préfigure une place grandissante pour la Création au sein des politiques des pays du continent africain, à condition qu’elle soit appuyée par des demandes et des propositions concrètes des organismes de gestion collective. Et au préalable, d’une meilleure efficacité des perceptions de droits d’auteurs et de droits voisins, ainsi que d’une gestion renforcée des catalogues d’œuvres.

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